À 60 km de Paris, 17 artistes ont construit une tête géante de 22 mètres pendant 25 ans

Dans le Bois des Pauvres, à 60 kilomètres de Paris, une tête cyclopéenne de 22,5 mètres surgit entre les hêtres. Le Cyclop de Jean Tinguely défie toute logique : 350 tonnes de béton, acier et miroirs scintillants plantées au cœur d'une forêt d'Essonne. Cette sculpture monumentale habitable reste le secret le mieux gardé d'Île-de-France.

Construite clandestinement pendant 25 ans par 17 artistes rebelles, cette œuvre vivante accueille seulement 31 000 visiteurs par an. Vous pénétrez littéralement dans l'art.

Une créature industrielle dans les bois de Milly-la-Forêt

Le parking du Bois des Pauvres ne laisse rien présager. Deux cents mètres de sentier forestier mènent à la révélation. L'œil rouge monumental apparaît soudain, immense pupille fixant les visiteurs entre les troncs.

Les miroirs de Niki de Saint Phalle captent la lumière filtrée par les feuillages. L'acier rouillé contraste avec le vert tendre des mousses. Cette tête sans corps de 22,5 mètres semble avoir poussé ici naturellement.

Coordonnées GPS 48.3570° N, 2.5925° E : impossible de la manquer une fois sur place. Impossible de l'imaginer avant d'y être. Contrairement aux châteaux classiques, cette œuvre défie les codes patrimoniaux.

L'aventure clandestine qui créa un monument national

Construction rebelle et collaborative (1969-1994)

Jean Tinguely initie le projet en 1969 sans autorisation officielle. Avec sa femme Niki de Saint Phalle et leurs amis sculpteurs, ils financent tout de leur poche. Bernhard Luginbühl, Rico Weber, Daniel Spoerri rejoignent l'aventure.

Pendant 25 ans, ils assemblent 350 tonnes de matériaux recyclés. Béton coulé à la main, acier soudé, miroirs fixés un à un. L'esprit collectif du Nouveau Réalisme prend forme dans cette forêt secrète.

Le vandalisme répété pousse Tinguely à donner l'œuvre à l'État français en 1987. Achèvement final en 1994, trois ans après la mort du maître suisse.

Vidéo du jour

Reconnaissance patrimoniale et programmation 2025

Le Cyclop appartient désormais à la collection du Centre National des Arts Plastiques. L'Association Le Cyclop veille sur cette œuvre unique, subventionnée par la région Île-de-France.

En 2025, la programmation célèbre les 30 ans d'ouverture au public. Performances artistiques, installations contemporaines et créations sonores animent régulièrement le site. Contrairement à Pierrefonds, restauré mais jamais habité, le Cyclop vit et respire.

Expérience immersive : pénétrer dans une sculpture vivante

Parcours labyrinthique et mécaniques animées

La visite guidée coûte 9 € pour les adultes, 6 € en tarif réduit. Durée : 45 minutes d'immersion totale. Vous ne regardez pas cette sculpture, vous la parcourez de l'intérieur.

Escaliers métalliques grimpent vers le sommet. Rouages mécaniques cliquetent en permanence. Sculptures sonores résonnent dans les couloirs de béton. L'eau ruisselle par la bouche-toboggan géante.

Au sommet trône le bassin hommage à Yves Klein. L'eau reflète le ciel bleu à travers les miroirs, créant une profondeur infinie. Sons industriels et échos forestiers se mélangent. Comme ce village breton préservé, le Cyclop échappe au tourisme de masse.

Cadre forestier et moments photographiques

L'extérieur reste libre d'accès et gratuit. Les miroirs changent d'éclat selon l'heure : dorés le matin, argentés l'après-midi, cuivrés au coucher.

Meilleure période : mai à septembre pour la verdure maximale. Horaires 10h30-18h30 les week-ends. L'automne offre un contraste saisissant entre les ors des feuillages et l'acier brut.

Points instagrammables : l'œil géant frontal, les miroirs reflétant la forêt, le bassin capturant les nuages. Faible affluence garantit des photos sans foule.

Ce que les musées parisiens ne peuvent offrir

Le Cyclop inverse la logique muséale classique. L'œuvre n'est pas dans un bâtiment : le bâtiment EST l'œuvre. Cette architecture habitable reste unique en France pour une sculpture de cette échelle.

Comparé à la Fondation Giacometti parisienne (10-15 €, urbaine, classique), le Cyclop propose immersion nature, sculpture monumentale habitable et authenticité collaborative. François Taillade, directeur de l'Association, explique : "Le Cyclop combine sculptures et performances pour un dialogue poétique avec notre monde."

Contrairement aux sites patrimoniaux saturés, Milly-la-Forêt et ses 6 000 habitants préservent la tranquillité. Un commerçant local témoigne : "Le Cyclop attire des passionnés d'art sans jamais créer de surcharge touristique."

Vos questions sur Le Cyclop de Jean Tinguely, Essonne, sculpture monumentale et vivante cachée en forêt répondues

Comment accéder au Cyclop et quand visiter ?

Accès voiture : parking dédié prolongement 66 rue Pasteur, Milly-la-Forêt. Depuis Paris : 60 kilomètres, 1h à 1h30 via A6. Train : gare Fontainebleau-Avon puis taxi 20-30 €. Billetterie en ligne recommandée, groupes limités à 25 visiteurs. Ouverture week-ends avril à novembre.

Que découvre-t-on à l'intérieur exactement ?

Sculptures sonores, petit théâtre automatique, machinerie aux engrenages de ferraille. La Méta-Maxi avec moteur 380 volts et poids d'une tonne. Face aux miroirs de Niki de Saint Phalle, Hommage aux déportés d'Eva Aeppli. Expérience artistique totale mêlant sons, mouvement et poétique.

Pourquoi cette œuvre reste-t-elle si méconnue ?

Construction clandestine initiale, localisation forestière isolée, communication volontairement discrète pour préserver l'authenticité. Sophie Duplaix du Centre Pompidou souligne : "Expérience artistique globale unique." Le Guide Michelin confirme : "Monument de béton et acier mêlant art et nature dans une construction quasi clandestine."

Au crépuscule, les miroirs du Cyclop capturent les derniers rayons orangés filtrant entre les hêtres. Les mécaniques intérieures poursuivent leur ballet perpétuel. Cliquetis métalliques résonnent dans le silence forestier. Un visiteur caresse l'acier rouillé avant de disparaître sur le sentier. La tête géante veille, gardienne éternelle d'une utopie artistique devenue réalité.