La matrice de collagène surpasse l'éponge de gélatine pour sceller l'alvéole après extraction

Lorsqu'une dent très abîmée doit être extraite, il est crucial de préserver au mieux l'os de la mâchoire et la gencive en vue d'un futur implant dentaire. Pour cela, les chirurgiens-dentistes ont recours à des techniques de préservation de la crête alvéolaire, qui consistent à combler l'alvéole d'un matériau de greffe osseuse et à la sceller par une membrane. Si l'impact de différentes membranes sur la préservation osseuse a été bien étudié, leur influence sur l'épaisseur de la gencive est moins connue. Pourtant, une gencive épaisse est garante d'une meilleure esthétique et santé des implants à long terme. Une récente étude menée à l'université de Gand en Belgique a comparé deux matériaux couramment utilisés pour sceller l'alvéole : une matrice de collagène d'origine porcine et une éponge de gélatine hémostatique. Les résultats apportent un éclairage nouveau sur la technique optimale de préservation alvéolaire.

Combler et sceller l'alvéole, une étape clé après l'extraction

Lorsqu'une dent est extraite, l'os alvéolaire qui l'entourait n'est plus stimulé et tend à se résorber. En quelques mois, on peut perdre jusqu'à 50% du volume osseux, compromettant la pose d'un implant. Pour limiter cette perte, il est recommandé de combler l'alvéole avec un substitut osseux, le plus souvent d'origine bovine, et de la sceller par une membrane ou un matériau de comblement. Ce scellement est crucial car il protège l'alvéole de la contamination bactérienne durant les premières phases de cicatrisation.

L'éponge de gélatine, une option économique mais limitée

L'éponge de gélatine hémostatique est fréquemment utilisée pour son faible coût. Cette éponge d'origine porcine favorise l'agrégation plaquettaire et la formation du caillot sanguin, première étape de la cicatrisation. Cependant, son épaisseur est limitée à 2 mm et elle doit être découpée aux ciseaux pour s'adapter à la forme de l'alvéole, ce qui est peu pratique.

La matrice de collagène, un matériau prometteur

Plus récemment, une matrice de collagène d'origine porcine a été développée spécifiquement pour l'usage alvéolaire. Non seulement elle guide la cicatrisation, mais sa structure favorise la migration des cellules gingivales. Avec une épaisseur de 3 à 4 mm et un diamètre adapté, elle ne nécessite pas de découpe et se suture aisément au niveau des berges.

L'étude de Gand : comparer les deux matériaux sur un même patient

Les chercheurs ont mis en place un essai clinique randomisé en bouche divisée. 18 patients nécessitant l'extraction de deux dents ont été inclus. Après avoir comblé chaque alvéole avec de l'os bovin enrichi en collagène, l'une a été scellée par la matrice de collagène (groupe test) et l'autre par l'éponge de gélatine (groupe contrôle), par tirage au sort. L'os et la gencive ont été mesurés par scanner à faisceau conique (cone beam) juste après l'intervention et 4 mois plus tard, délai habituel de cicatrisation avant la pose d'un implant.

Un facteur clé révélé : l'épaisseur de gencive mieux préservée par la matrice de collagène

Les résultats montrent qu'à 4 mois, il n'y a pas de différence significative entre les deux groupes concernant la perte osseuse horizontale, qui reste limitée. Cela suggère que les deux matériaux scellent efficacement l'alvéole et soutiennent la préservation osseuse. En revanche, l'épaisseur de la gencive au centre de l'alvéole est significativement plus importante dans le groupe test que dans le groupe contrôle (2,48 mm contre 1,81 mm en moyenne). La matrice de collagène a aussi mieux préservé la hauteur de la gencive en vestibulaire. Cette épaisseur et hauteur de tissu mou sont cruciales car elles influencent l'esthétique de la future prothèse et la santé de l'implant sous-jacent.

Un bénéfice à confirmer sur le long terme

Si les mécanismes exacts restent à élucider, on peut penser que la structure de la matrice de collagène, sa résorption progressive et sa capacité à guider la migration des cellules gingivales favorisent le maintien de l'épaisseur gingivale. Il sera intéressant de suivre les patients sur un plus long terme, après la pose de l'implant, pour confirmer que ce bénéfice perdure et permet de limiter le recours à des greffes gingivales additionnelles, souvent nécessaires pour optimiser le résultat esthétique mais au prix d'une intervention supplémentaire.

La préservation alvéolaire, une approche préventive d'avenir

Avec le vieillissement de la population et l'essor de l'implantologie, la préservation alvéolaire est amenée à se généraliser. En limitant la perte osseuse post-extractionnelle et en optimisant la qualité des tissus mous, elle facilite la mise en place des implants dans une situation anatomique favorable, avec à la clé de meilleurs résultats esthétiques et un pronostic pérenne. Si son surcoût immédiat peut freiner son adoption, elle s'inscrit dans une logique médico-économique préventive vertueuse à long terme.

Vers un changement des pratiques ?

Alors que l'éponge de gélatine reste très utilisée pour son faible coût, cette étude pourrait inciter les praticiens à privilégier la matrice de collagène lorsque l'esthétique et la qualité des tissus péri-implantaires sont une priorité, notamment en secteur antérieur. La formation des chirurgiens-dentistes à ces protocoles de préservation alvéolaire et la prise en charge de ces actes par les mutuelles seront des facteurs clés pour démocratiser cette approche d'avenir.

FAQ

Quelles sont les techniques de préservation alvéolaire ?

Les principales techniques combinent le comblement de l'alvéole par un matériau de substitution osseuse (le plus souvent d'origine bovine ou synthétique) et son scellement par une membrane ou un matériau de comblement (membrane de collagène, matrice de collagène, éponge de collagène, greffe gingivale prélevée au palais). L'objectif est de stabiliser le caillot, de guider la régénération osseuse et gingivale et de protéger l'alvéole de l'infection.

Quels sont les bénéfices de la préservation alvéolaire ?

Par rapport à une cicatrisation naturelle, la préservation alvéolaire limite la résorption de la crête osseuse dans les suites de l'extraction. En préservant un volume osseux suffisant et des tissus mous de qualité, elle facilite la mise en place d'un implant dans une situation anatomique favorable, voire évite des greffes osseuses ou gingivales additionnelles. Le résultat esthétique et fonctionnel des prothèses implanto-portées s'en trouve optimisé.

Quand réaliser une préservation alvéolaire ?

Elle est particulièrement indiquée en secteur antérieur, lorsque l'esthétique est une priorité et que l'on souhaite mettre en place un implant à moyen terme (3 à 6 mois). Elle est aussi recommandée en cas de perte de paroi osseuse vestibulaire lors de l'extraction ou de défaut osseux pré-existant. À l'inverse, elle n'est pas nécessaire si les parois alvéolaires sont intactes et que l'implantation peut être réalisée de façon précoce, ou si une prothèse fixe conventionnelle est prévue.

Quelles sont les suites opératoires d'une préservation alvéolaire ?

Les suites sont généralement simples, avec une gêne et un oedème limités. Un traitement antalgique et anti-inflammatoire est prescrit pour les premiers jours. Dans les techniques par comblement, la gencive mettra quelques semaines à recouvrir complètement le matériau. Des bains de bouche à la chlorhexidine sont recommandés pour limiter le risque infectieux. Des points de suture résorbables sont souvent utilisés. Un contrôle est réalisé à une semaine pour vérifier la bonne cicatrisation. La pose de l'implant pourra être envisagée après 3 à 6 mois selon les cas.